ABBAYE NOTRE-DAME DE CHÂTILLON

L’abbaye Notre-Dame de Châtillon puise ses origines dans la collégiale fondée vers 991 par l’évêque de Langres, Brun de Roucy, et composée de chanoines séculiers dont l’enseignement de grande qualité était très réputé. C’est auprès d’eux que saint Bernard fit une scolarité studieuse. Il s’en souviendra en les régularisant quelques années plus tard.  C’est en 1136 que l’abbé de Clairvaux et l’évêque de Langres, Vilain d’Aigremont officialisèrent la naissance de la nouvelle abbaye qui adopta la règle de saint Augustin. Notre-Dame de Chatillon s’affilia presqu’aussitôt  à la congrégation d’Arrouaise.

Les premiers chanoines réguliers, sans abandonner la butte de Saint-Vorles où ils étaient installés et où il demeurèrent encore quelque temps, implantèrent leur nouvelle maison dans la prairie située en bord de Seine, extérieure aux murailles  du bourg, dans le faubourg dit de « Courcelles-Prévoires ». La construction de l’église aurait été entreprise dès 1139.

La règle de saint Augustin, en alternant offices et travail manuel, pouvait être rapprochée de celle qui sera adoptée par Cîteaux.

Les femmes étaient admises à l’origine dans l’ordre, en tant que converses. Elles résidaient dans un lieu séparé, qui disparaîtra dès le début du XIVè siècle. Les quelques restes de ce monastère, connu sous le nom des « Dames brûlées » sont encore visibles de nos jours dans le parc du château Marmont, en bordure de Seine.

Très rapidement, l’application de la règle s’adoucit et on assista à un relâchement de la discipline. L’usage de la viande, interdite cinq jours sur sept, se généralisa. Dès le début du XIVè siècle, l’abbé ne dormait plus dans le dortoir des moines et prenait ses repas séparément. Le partage des biens et des revenus entre religieux, abbé et officiers claustraux, contribua à opposer la communauté à son abbé et donna lieu à de nombreux litiges.

Le régime de la commende fut instauré en 1494 et le premier abbé commendataire fut l’évêque d’Auxerre, François de Dinteville.

La réformation de l’abbaye souhaitée par le roi Louis XIII, entraîna son affiliation à la congrégation des génovéfains, en 1638, dont l’abbaye mère était Sainte-Geneviève de Paris (Congrégation de France).

C’est durant son long abbatiat  (1662-1710), qu’Henri Lenet, fit aménager l’esplanade du Cours l’Abbé.

La nouvelle abbaye, du fait des conditions particulières de sa fondation, bénéficia dès l’origine du patrimoine détenu par les chanoines séculiers. Elle ne fut pas fondée comme le rappelle Michel Petot, « ex nihilo ».

Sans avoir l’importance de celui de Molesme, le temporel de Notre-Dame de Châtillon était loin d’être négligeable. Il présentait l’avantage d’être concentré localement dans le châtillonnais, ce qui facilitera sa gestion.

L’abbaye était propriétaire de la métairie du Val-de-Nuit, sur le territoire de Riel-les-Eaux, des fermes de l’abbaye et de la Grange Emery sur celui de Châtillon-sur-Seine, de la grange de Voisin à Nod-sur-Seine, et d’un important domaine à Chaume-les-Baigneux.

L’abbaye possédait par ailleurs plusieurs moulins, à savoir, le moulin des Pacesà Châtillon, celui dit des Malades sur Sainte-Colombe-sur-Seine ou encore celui de Villotte-sur-Ource. Elle était à la tête d’un important domaine viticole, avec notamment 105 ouvrées de vigne sur Massingy, 65 ouvrées sur Poinçon-les-Larrey.

A ces biens fonds s’ajoutait une multitude de droits seigneuriaux, de droits curiaux et de dîmes. Dès le XIIIè siècle, Notre-Dame détenait les seigneuries de Chaume-les-Baigneux, Poinçon-les-Larrey, Villotte-sur-Ource et Massingy et possédait pas moins d’une vingtaine d’églises.

A la Révolution, il ne restait que dix religieux, qui déclarèrent le9 janvier 1791, aux officiers municipaux de la Ville de Châtillon, unanimement et cependant individuellement ce qui suit :

« que profondément affligés de l’idée seule de voir interdire notre église, d’apposer les scellés sur les choses les plus sacrées et d’être réduits à une pénible séparation,

«Nous demandons à continuer librement la vie commune avec des chanoines réguliers dans cette maison. »

« Nous demandons aussi positivement que cette déclaration soit regardée comme nulle et non avenue, si elle peut gêner la liberté. De renoncer à cette vie commune quand il nous paraîtra, avantageux, nécessaire ou convenable de le faire.

……

Leur demande de maintien dans les lieux ne sera pas retenue malgré l’appui qui leur sera apporté par la municipalité et la pétition adressée à l’Assemblée nationale le 6 avril 1791. C’est à Molesme qu’ils seront invités à poursuivre la vie commune.

Les biens de l’abbaye, comme tous les biens ecclésiastiques, ont été mis à la disposition de la Nation, le 2 novembre 1789, dans la perspective de leur vente comme biens nationaux.

Principales ventes dans le district de Châtillon

  1. La ferme de l’abbaye, située sur le territoire de Châtillon-sur-Seine,  composée de bâtiments, cours, aisances et dépendances, de 159 journaux 7 perches de terres en 17 pièces ; 5 arpents 8 perches un tiers de prés, et une chènevière, a été vendu le 26 février 1791 su siège du district de Châtillon-sur-Seine, à Edme Alexandre Thoureau, ancien greffier au bailliage et Jacques Personne, négociant, demeurant à Châtillon, moyennant le prix principal de 51000 livres.
  2. Le moulin des Paces, à Châtillon, comprenant, bâtiments, dépendances, 5 journaux de terre et pré, a été  adjugé le 26 mars 1791 à Edme Nicolas Viesse (père du maréchal Marmont), demeurant à Châtillon, moyennant le prix principal de 20000 livres.
  3. La ferme de la Grange Emery à Châtillon-sur-Seine, comprenant bâtiments, 500 journaux de terre et 4 petites pièces de pré, adjugée le 2 avril 1791 à Claude Philippon-Durand et Jean Meulder, demeurant à Châtillon-sur-Seine, moyennant le prix principal de 36200 livres.
  4. Le moulin dit des  « Malades » sur Sainte-Colombe-sur-Seine, avec huilerie, place à foulon à écorces, prés et jardin, adjugé le 30 décembre 1791, à Nicolas Edme Viesse, moyennant le prix principal de 32500 livres.
  5. Un emplacement contenant plusieurs lavoirs à mines, situé à Châtillon, près du Pont neuf, sur la route de Paris, adjugé le 2 mars 1793 à Nicolas Verpy, négociant à Châtillon, moyennant le prix principal de 7600 livres.
  6. Les bâtiments conventuels et l’abbatiale ont été mis en vente le 23 février 1793, mais n’ont pas trouvé acquéreur faute d’enchérisseur. Ils ont été remis en vente le 25 thermiidor an V et adjugés à l’Hospice des pauvres de Châtillon-sur-Seine

Vente dans le district de Semur-en-Auxois

La ci-devant seigneurie de Chaume-les-Baigneux, comprenant bâtiments, jardins, enclos, environ 72 soitures ½ de prés, 207 journaux de terres, moulin. Adjugée le 7 juin 1791, à Claude Hugo, citoyen d’Oigny moyennant le prix principal de 67000 livres.

L’église abbatiale après les importants travaux de réfection réalisés entre 2014 et 2018
Les vantaux en bois de la porte d’accès à l’église sont du XVIIè siècle (1618 si on retient l’inscription figurant sur l’un d’eux). Les ferrures (qui sont à rapprocher de celles existant sur la porte de l’abbatiale de Pontigny), sont sans doute des XIIè-XIIIè siècles. Elles ont été remontées sur les vantaux au moment de leur remplacement.

Au Dessus de la porte, la plaque apposée au XIXè siècle, comporte cette citation tirée du livre de la Genèse ; « NON EST HIC ALIUD – NISI DOMUS DEI – ET PORTA COELI » (Ceci n’est pas autre chose que la maison de Dieu et la porte du ciel).