L’abbaye d’Oigny, a été fondée au début du XIIè siècle, dans un vallon étroit, retiré et sauvage, emprunté par la Seine, qui n’est alors qu’un ruisseau dont la source n’est distante que d’une dizaine de kilomètres plus au sud.
Le lieu était auparavant le siège d’un ermitage occupé à la fin du XIè siècle par le frère Christophe et quelques ermites. C’est sans doute ici que s’étaient retirésprovisoirement, en 1094, Albéric et Etienne Harding, alors moines de Molesme, avant leur départ pour fonder Cîteaux au printemps 1098.
La fondation de l’abbaye eut lieu en 1106, à la suite du don des lieux consenti par les seigneurs du voisinage, Gaudin, seigneur de Duesme et Adeline, son épouse, et Milon, seigneur de Frolois. Le monastère a été placé sous la règle de saint Augustin. Christophe devint le premier abbé. La confirmation par l’évêque d’Autun, en 1116, du don des lieux sera considérée comme la charte de fondation.
D’autres seigneurs locaux exprimèrent leur générosité à l’égard de la nouvelle fondation.. C’est ainsi que Oigny, reçut en donation la grange de l’Epineuse sur le territoire de Venarey-les-Laumes, celles de Volnay (Arnay-sous-Vitteaux) et de Cromot (Marigny-le-Cahouet) et un domaine de Baigneux-les-Juifs.
Les ducs de Bourgogne capétiens n’oublièrent pas les chanoines réguliers d’Oigny. Hugues II, avec l’accord de la duchesse Mathilde et de leur fils, donna à l’abbaye le territoire d’Orret.
A ces biens fonciers, s’ajoutèrent dîmes et autres biens.
A cette constitution assez traditionnelle du temporel, l’abbaye eut recours, après son passage sous le régime de la commende, à une démarche plus originale pour l’accroître.
L’abbaye d’Oigny possédait en effet, à proximité même de son lieu d’implantation, un important domaine forestier à partir duquel, va être créé, par voie de défrichage ou d’essartage, un grand nombre de métairies. Ces nouvelles granges, édifiées pour la plupart d’entre elles à la fin du XVIème siècle et dans une moindre mesure dans la première moitié du XVIIème, à l’initiative de l’abbaye, avaient manifestement pour finalité d’accroître les revenus de l’abbaye. La rapacité de certains abbés lorsque l’abbaye fut placée dès 1535 sous le régime de la commende et les désordres qui ont secoué la maison en cette période de l’Ancien Régime, furent probablement à l’origine de ces besoins financiers.
Une multitude de baux à cens furent conclus avec l’obligation notamment de défricher, d’essarter, de mettre en culture et de bâtir maison et grange. Les lieux d’implantation n’étaient guère propices à la culture. Les emplacements concédés par les baux étaient souvent des bois rabougris ou parfois d’anciennes terres abandonnées, laissées à l’état de friche.
La piètre qualité des terres exprimée par le nom donné à certaines de ces métairies, comme Vuide-Bouteille sur le territoire d’Oigny ou encore « Les Vieux Essarts » connue sous son nom actuel de « Meurs-de-faim » sur celui d’Orret (qui existent encore de nos jours), explique que certaines d’entre elles n’ont eu qu’une vie éphémère et ont donc rapidement disparu. La carte de Cassini établie dans le milieu du XVIIIème siècle ne mentionne d’ailleurs plus leur existence.
Quelques autres, par la nature des contrats consentis aux preneurs, ont été considérées comme aliénées et sorties du patrimoine de l’abbaye à la fin de l’Ancien Régime. D’autres sont demeurées dans le patrimoine de l’abbaye jusqu’à sa disparition à la Révolution. Elles seront vendues comme biens nationaux, à Châtillon-sur-Seine, pour celles situées dans le ressort du district de Châtillon (Vieux Essarts, Champignolot) et à Semur-en-Auxois pour celles relevant de celui de Semur (Métairies de Charmoi, de Gibot, de Vuide-bouteille et quelques autres.) .
Oigny passa sous le funeste régime de la commende, en 1535. Le premier abbé commendataire fut André de Laval, doyen de la Sainte-Chapelle de Dijon. Plus connu fut son successeur, Philippe de Lenoucourt, élu évêque de Châlons en 1550 où il a succède à son oncle, Robert de Lenoncourt. Il devint par la suite archevêque de Reims. Le pape Sixte V le nomma cardinal lors du consistoire du 16 novembre 1586. Il était également abbé commendataire de Saint-Martin d’Epernay et de Rabais. Il résigna ses fonctions d’abbé d’Oignyau profit de d’Olivier de Gaidon. Cette transmission ne fut pas gratuite, car son successeur lui paya la (modeste) somme de 1000 livres.
Au cours du XVIIè siècle, Oigny, comme sa sœur, Notre Dame de Châtillon, se rattacha à la congrégation de France, dont l’abbaye-mère, était l’abbaye Sainte-Geneviève de Paris, d’où le nom de genovéfains donné aux religieux des abbayes qui en dépendaient.
Comme dans beaucoup d’établissements monastiques, l’institution de la commende et le relâchement de la discipline, eurent raison de la vie communautaire. En 1789 il ne restait dans l’abbaye que 3 religieux.
A la Révolution, les biens de l’abbaye, comme tous les biens ecclésiastiques, furent mis à la disposition de la Nation et vendus comme biens nationaux. La maison conventuelle, l’église, les cours, jardins, granges séparées, huilerie, enclos et diverses parcelles ont été vendus, le 27 thermidor an IV (14 août 1796), à Bernard Marin Dumaine, propriétaire, demeurant à Auxerre, moyennant un prix sur la base de l’estimation faire en 1790.